CINQ SERMONS 
DES SOVSPIRS 
DES FIDELES. 
SVR LE CHAPITRE 
8. de l'Epistre de Sainct Paul aux 
Romains, verset 22. 
  Et non seulement les creatures, mais 
nous aussi, qui auons les premices de 
l'Esprit, nous mesmes souspirons en 
nous mesmes en attendant l'adoption, 
la redemption de nostre corps . 
    
SERMON PREMIER.
  
 LES afflictions 
qui accompagnent 
la condition 
du fidele 
en ce monde, sont, pour le 
plus souuent, & si grandes, 
  
& en si grand nombre , que 
si l'Esprit de Dieu ne le 
soustenoit en l'attente d'vn 
meilleur estat, il succomberoit 
facilement,& seroit accablé 
de leur pesanteur. 
Mais , si les aduersitez de 
ceste vie calamiteuse le trauaillent 
& le contristent, 
l'espoir qu'il a d'vne vie 
plus souhaittable le console 
& le resiouït; s'estimant infiniment 
plus heureux par 
l'esperance des biens qu'il 
attend,que miserable par la 
souffrance des maux qu'il 
endure. Car , il n'y a point 
de proportion entre les calamitez 
sous lesquelles il 
souspire , & le bon-heur auquel 
[quel] 
 
il aspire,par la possessiõ 
duquel sa personne sera despouïllée 
de toute infirmité, 
affranchie de toute misere, 
comblée de felicité , reuestue 
de gloire eternelle. 
  
Par ceste diuine consolation, 
l'Apostre S. Paul nous 
fortifie grandemẽt, afin que 
si nous sommes exercez par 
les espreuues de la croix, 
nous les souffrions patiemment , 
sous l'esperance de 
nostre beatitude. Es versets 
precedents, nous ayant representé 
l'excellẽte dignité 
de laquelle Dieu nous honore , 
par nostre adoption, 
nous faisans ses enfans , ses 
heritiers , & coheritiers de 
 
Iesus Christ son Fils: il nous 
auoit en suitte parlé des aduersitez 
que nous auons à 
souffrir pendant le cours de 
ceste vie , afin que lors que 
nous en serons accueillis & 
trauaillez , elles ne nous 
semblent pas nouuelles ou 
estranges , & que nous n'en 
soyons pas surpris , ny estonnez: 
mais que nous les 
supportions constamment, 
& genereusemẽt. Pour cest 
effect,il nous a proposé plusieurs 
raisons & arguments 
de tres-grand poids, & premierement 
l'exemple de 
Iesus Christ , auquel nous 
deuons estre conformes en 
souffrances,afin que nous le 
[soyons] 
 
soyons en gloire. En second 
lieu , l'excellence de nostre 
beatitude celeste, à laquelle 
toutes les plus grandes afflictions 
& miseres de ceste 
vie comparées ne sont rien. 
En troisieme lieu , il auoit 
mis en auant l'exemple des 
creatures de cest vniuers, 
lesquelles estans subiectes à 
corruption & à vanité , par 
le peché de l'homme,& n'en 
pouuans auoir la deliurance 
qu'en celle des enfans de 
Dieu , desirent ardamment 
le iour auquel ils seront tous 
glorifiez : ce qu'attandants, 
elles souspirent , & sont en 
trauail ensemble iusques à 
maintenant. 
   
En suite duquel exemple, 
il nous monstre,comme les 
fideles (qui ont la plus grãd 
part aux miseres de ce mõde ) 
contribuent aussi leurs 
souspirs, auec leur esperãce, 
à ce bien tant souhaitté de 
toutes cratures. Et bien 
qu'ils soyent doüez des graces 
de l'Esprit de Dieu, 
qu'ils ne laissent pas de gemir 
en ceste attente : mais 
qu'ils sont soustenus & fortifiez 
par c'est Esprit , qui 
leur donne les arrhes du 
parfait bon-heur que Dieu 
promet à ses enfans ,& de 
leur glorification , non seulement 
en leur ame , mais 
aussi en leur corps , par vn 
[resta-] 
  
restablissement incomparablement 
plus heureux , que 
celuy des autres creatures. 
Partant  nõ seulement  icelles, 
  mais nous aussi , qui auons les 
premices de l'Esprit , nous 
mesmes souspirons en nous mesmes , 
en attendant l'adoption, 
la redemption de nostre corps  . 
  
Les creatures visibles dõt 
ce monde est composé , les 
terrestres & les celestes, les 
animées & les inanimées, 
souspirent & pour les diuerses 
causes , que nous en auons 
cy deuãt declarées,en 
nos sermons sur le verset 
precedent. Ces causes sont 
l'empirement de leur premiere 
condition,par la trãsgression 
 
de nos premiers 
parents,& par les autres pechez 
qui s'en sont ensuiuis. 
2. Les trauaux,les peines, & 
les souffrances qu'elles endurent, 
pour le seruice de 
l'homme , & pour le soulagemẽt 
de ses miseres, & les 
dommages qu'elles en reçoiuent. 
3. Les abus par 
lesquels il les profane. 4. Et 
l'attente de leur deliurance 
d'vne condition si calamiteuse , 
deliurance qu'elles 
obtiendront lors que celle 
des enfans de Dieu sera 
manifestée. Pour toutes ces 
choses.  Nous sçauons que toutes 
creatures souspirent, & sont 
en trauail ensemble iusques à 
[ main- ] 
 
 maintenant  . 
  
Mais , auec l'vniuersité, 
des creatures  nous souspirons  
semblablement , & à 
plus forte raison qu'elles. I. 
D'autãt que c'est par nostre 
offense, non par la leur,que 
la deterioration de l'vniuers 
a esté causée:que nous sommes 
coulpables du peché 
duquel elles sont innocentes : 
2. Que nos souffrances 
surpassent de beaucoup les 
leurs: 3. Que si elles souspirent 
incessamment pour 
nostre deliurance & bon-heur , 
nous estans doüez 
d'intelligence & de l'Esprit 
de Dieu, dont elles sont destituées , 
deuons auoir plus 
 
de ressentiment de nostre 
misere , & plus de desir de 
nostre beatitude. 4. Et finalement , 
parce qu'en la restauration 
de toutes choses 
nous attendons celle qui 
est la plus excellente de 
toutes,assauoir le souuerain 
comble de felicité. A bon 
droit donc non seulement 
elles souspirent ,  mais nous 
aussi qui auons les premices de 
l'Esprit,nous mesmes souspirons 
en nous mesmes , en attendant 
l'adoption , la redemption de 
nostre corps   . 
  
Bien qu'aucuns ayent 
estimé , que S.Paul entende 
icy parler seulement des Apostres , 
qui ont receu les 
[com-] 
 
commencements des dons 
& les premieres graces que 
le Seigneur a communiqué, 
sous l'Euangile,à son Eglise, 
neantmoins , puis que ces 
paroles conuiennent à tous 
fideles , lesquels Dieu fauorise 
des premices de son 
Esprit , & qui souspirent en 
ce val de calamitez , nous 
prenons ainsi generalement 
le sens de ce passage,& comme 
estant plus consolatoire. 
L'Apostre donc disant, 
  Nous aussi souspirons  , ou  gemissons  , 
le terme ayant ces 
deux significations,ne nous 
commande pas vne indolence 
stoique , vne morne 
stupidité, vne plusque brute 
 insensibilité aux afflictions: 
car la pieté n'esteint pas le 
sentiment & & ne destruit 
point la nature : mais plustost 
tesmoigne elle,que c'est 
à nous de souspirer & gemir 
en la terre , veu les maux 
que nous sommes cõtraints 
d'y voir & d'y souffrir. Et par 
la consideration desquels, 
nous conceuons vne plus 
grande horreur du peché, 
vn plus grand mespris du 
monde , vn plus grand desdain 
de ceste vie , vne plus 
viue esperance de celle qui 
est à venir , pour laquelle 
aussi l'Apostre dit, que nous 
gemissons estans chargez.  
2. Corinth. 5.   [Dauant-]   Dauantage,disant, 
Nous 
souspirons,& y comprenant 
tous les saincts persõnages, 
il nous exhibe vn nombre 
plus que suffisãt d'exemples 
de patiẽce: veu que tant de 
milliers de fideles, qui nous 
ont precedé par tant de siecles , 
ont souspiré pour les 
mesmes causes que nous , & 
que les mesmes souffrances 
s'acomplissent en la compagnie 
de nos freres qui est 
par le monde. 
I. Pierre. 5. Ceste multitude presque 
infinie de tant de saincts, 
dont les vns ont esté cy deuant, 
& les autres sont auiourd'huy 
nos compagnons 
d'affliction , de patience , & 
   
d'esperance , ne nous doit 
elle pas grandement augmenter 
le courage , & accroistre 
la constance , au 
plus fort de nos aduersitez, 
puis que les exemples, sur 
tout des personnes cheries 
de Dieu , sont de si grande 
efficace , & que nous les auons 
si nombreux , & innombrables? 
  
Mais à ces exemples est 
iointe la consideration du 
priuilege , duquel Dieu 
nous honore , nous qui auons 
les premices de l'Esprit . Ainsi 
sont appelées les graces salutaires 
du S. Esprit , lesquelles 
Dieu nous communique 
en petite mesure , & 
[par] 
 
par quelques commencements , 
pendant ceste vie, 
mais qui nous sont des gages 
de la pleine abondance 
de laquelle il nous cõblera 
dans les cieux. Ces dons 
que l'Apostre nomme premices 
sont la lumiere de 
cognoissance, l'intelligence 
des mysteres du salut, la pureté 
de la volonté , la sincerité 
des affections , le renouuellemẽt 
de vie , la paix 
auec Dieu , le repos de la 
conscience , les delices spirituelles. 
Le Sainct Esprit 
produit plusieurs & diuers 
effects , lesquels il desploye 
selon la nature des suiects, 
& selon la fin pour laquelle 
 
il agit. Mais ceux que l'Escriture 
appelle les premices, 
assauoir des biens celestes, 
sõt les plus excellẽts,& 
les plus souhaittables. Le S. 
Esprit agit en la nature , laquelle 
il conserue , maintiẽt 
& gouuerne.Il agit és hommes , 
leur communiquant 
des dons pour l'vtilité publique 
& particuliere , & 
pour ce qui concerne ceste 
vie. Mais il agit és fideles, 
pour leur salut , les ornant 
de vertus & graces spirituelles 
& celestes.Et certes, 
puis qu'ils sont enfans de 
Dieu , n'est il pas conuenable 
que les dons les plus 
precieux de son esprit leur 
[soyent] 
 
soyent departis , veu que les 
biens les plus specieux,& les 
plus exquis qu'ayent les peres , 
sont pour leurs enfans? 
Et les graces que Dieu communique 
en ce monde aux 
siens , estans les commencements 
d'autres plus grandes, 
qu'ils possederont dans 
le Ciel , sont qualifiées premices , 
ce qui ne se peut pas 
dire des dons que Dieu 
confere aux autres hõmes, 
pour ceste vie seulement,apres 
laquelle ils perissent. 
  
Ces graces donc sont 
excellẽtes en toutes sortes. 
Car si l'homme est releué 
par dessus les bestes,par son 
esprit , & par les facultez & 
 
proprietez de son ame;bien 
plus le fidele surpasse-il les 
autres hommes,par l'Esprit 
de Dieu , qui est en luy, & 
par les vertus & qualitez celestes 
qu'il y imprime? Ces 
premices de l'Esprit nous 
donnent de la conformité 
auec Dieu , restablissent en 
nous son image , que satan 
auoit destruite par le peché, 
par lequel il auoit tracé en 
nous la sienne , & nous auoit 
rẽdus semblables à soy: 
Mais,par ces dõs de l'esprit, 
ceste image du diable que 
nous portions, s'efface & 
s'abolit , & celle de Dieu est 
repeinte en nous. Et comme 
c'est vne chose glorieuse 
[que] 
 que d'auoir de la ressẽblance 
auec Dieu , l'Escriture 
saincte appelle aussi ces graces 
de nostre sãctificatiõ,vne 
gloire , qui se rend de plus 
en plus illustre par l'accroissement 
des vertus , & qui 
s'accomplira finalemẽt dãs 
le ciel. Ainsi nous tous , qui 
contemplons comme en vn 
miroir la gloire du Seigneur, 
à face descouuerte,sommes 
transformez en la mesme image 
de gloire en gloire, 
cõme de par l'Esprit du Seigneur.  
2. Cor. 3. Ces premices 
du S. Esprit sõt si excellentes, 
qu'elles nous sõt des 
preparatifs & dispositions à 
la vie eternelle, & des commencements 
  de ses perfections , 
& de son bon heur. 
Car comme les meschans 
sentent desia leur enfer en 
eux mesmes;à l'opposite les 
fideles iouïssent dés maintenant , 
par vn auant-goust, 
des douceurs,& des ioyes de 
la beatitude celeste. A raisõ 
dequoy Iesus Christ disoit,  
Qui croit en moy a vie eternelle. 
La dignité de ces premices 
& les consolations 
qu'elles nous apportent sõt 
si grandes,quelles surpassẽt 
incomparablement toutes 
les richesses, & les ioyes des 
mondains. Ce qui faisoit 
dire à Dauid. 
Ps. 4. Tu as 
mis plus de liesse en mon 
[cœur,]   
cœur, qu'ils n'ont au temps 
que leur froment , & leur 
meilleur vin ont foisonné. 
Et à Iesus Christ. 
Quicõque 
aura delaissé maisons , ou 
freres, ou sœurs, ou pere,ou 
mere,ou femme, ou enfans, 
ou champs, à cause de mon 
nom, il en receura cent fois 
autant ; & heritera la vie eternelle.  
Matth. 19. Ces 
diuines premices sont infiniment 
plus que toute l'abondance 
que les hommes 
possedent au monde,& que 
tout le monde ensemble, 
que toutes les delectations 
& les delices , qu'ils y pourroyẽt 
ny auoir,ny cõceuoir. 
   
Or ces graces du S.Esprit 
 sont dites premices, à cause 
des rapports qu'elles ont auec 
les premiers fruicts 
qu'on offroit à Dieu sous la 
Loy , lesquels on nommoit 
premices, & dont il est parlé 
dans les liures de Moyse,  
Exode 34.v.26. Leuitique 
23.v.10. Nombres. 18.v. 13.  Deuteronome 26. v.2.Car 
comme ce n'estoit que la 
premiere portion,& le commencement 
des fruicts,dõnant 
vne esperance certaine 
de toute la moisson: les dõs 
de l'Esprit de Dieu,qui nous 
sont conferez en ceste vie, 
ne sont qu'vne petite partie 
de l'abondance dont nous 
serons remplis en la vie à 
[venir]   venir , & vne asseurance de 
son accomplissemẽt. Maintenant 
l'Esprit de Dieu ne 
nous est pas eslargi en pleine mesure , 
veu que nous 
sommes au temps de l'infirmité, 
non de la perfectiõ. 
Car nous cognoissons en 
partie , & prophetizons en 
partie : mais quand la perfection 
sera venüe , lors ce 
qui est en partie sera aboli.  
Nous voyons maintenant 
par vn miroir obscurement, 
mais alors nous verrõs face 
à face, 
2. Cor.13. Ce terme 
donc nous esleue à l'esperance 
asseurée du comble 
des biens spirituels & celestes , 
pour nostre entiere 
  
beatitude?Car si nous auons 
les premices , la plenitude 
nous sera donnée : si les 
commencements,nous obtiendrons 
l'accomplissemẽt 
en son temps.2. Les premices 
deuançoyent de bien 
pres la cueillette : & les premices 
du S. Esprit serõt biẽ 
tost suyuies de l'abondance 
des dons , qui nous est promise, 
laquelle ne tardera pas, 
mais est tres-proche. Car 
nostre vie est courte & passe 
en vn moment , apres la 
brieue course de laquelle, 
nous serons iouïssans du 
comble que nous attendons 
des graces eternelles. Et de 
mesme que la cueillette secondoit 
[con-] 
 
immediatemẽt les 
premices : aussi sans entredeux, 
& sãs interualle, apres 
la fin de ceste vie,en laquelle 
nous auons les premices, 
nous obtiendrons la plenitude 
de tous dons dans les 
cieux. 
  3. Par la sanctification 
des premices , le reste des 
fruicts estoit sanctifié : dont 
l'Apostre dit aux 
Romains, 
chap. II. Si les premices sont 
sainctes,aussi est la masse : & 
par les premices de l'Esprit, 
tout ce que Dieu nous donne 
consequemment, & nostre 
ame & nostre corps,luy 
sont sanctifiez. 4. Il faloit 
que non seulement les premices 
  
fussent dediées à 
Dieu , mais aussi que toute 
la masse , (estant sanctifiée 
en elles) fust employée à 
tous bons & saincts vsages, 
semblablement , & les premices 
que nous auons de 
l'Esprit de Dieu , luy doiuẽt 
estre religieusement consacrées 
(sans qu'elles perissent 
par nostre faute,ni qu'elles 
soyent profanées , ou souïllées 
par aucun abus)& tout 
ce qui est en nous,& à nous, 
comme sanctifié par les 
premices , doit estre entierement 
destiné à sa gloire, 
par tous vsages legitimes. 
  
Les Israelites offroyent à 
Dieu les premices de leurs 
[reuenus] 
 
reuenus : il veut aussi que 
nous luy dedions vne portion 
des nostres. Ce sont 
des biens terriens,corporels 
& perissables , mais il donne 
à ses fideles des premices 
infiniment plus excellentes 
des biens spirituels, 
celestes & permanents. Si 
nous presentons à Dieu 
quelque chose de nostre auoir, 
c'est des dõs qu'il nous 
a eslargis : mais les premices 
qu'il nous donne,& le total, 
sont à luy proprement & 
entierement : & c'est par sa 
pure liberalité que nous en 
sommes participans. Et au 
lieu que les hommes estoyent 
tenus de luy consacrer 
 
les premices de leurs fruicts: 
au contraire, il nous donne, 
par pure gratuité , celles de 
son Esprit , & l'abondance 
dont elles seront suyuies. 
Par les premices Dieu declaroit 
qu'il se contente que 
nous luy donnions quelque 
chose de ce que nous auõs: 
mais il nous veut donner, 
auec soy mesme , tout ce 
qu'il a , tous ses biens : & si à 
present il ne nous en donne 
que les premices , c'est vne 
asseurance que nous en aurons 
l'accomplissement. 
  
Remarquons cependant, 
que ce mot de  premices  dont 
vse l'Apostre , estant tiré de 
ce qui estoit vsité sous la 
Loy ceremonielle , nous 
 
monstre que la lecture du 
viel Testament nous est tres-vtile , 
pour l'intelligence de 
plusieurs termes , qui en 
sont empruntez , & qui sont 
frequens dans le Nouueau 
Testament: outre les autres 
doctrines que nous y trouuons ; 
que celuy a esté dicté 
par le mesme Esprit que celuy 
cy;que celuy a esté fondé 
sur celuy là , que Iesus 
Christ & ses Apostres , nous 
en recõmandent si soigneusement 
la lecture. Et bien 
que sous l'Euangile les offrandes 
& les ceremonies 
de la Loy ne soyent point 
en vsage , ayans esté abolies 
par Iesus Christ : toutesfois 
 
l'enseignement nous en demeure. 
Ainsi ce qui estoit 
representé par les sacrifices, 
par les lauements , par les 
Sacrements du viel Testament. 
De mesmes ce que la 
Loy des premices ordõnoit, 
nous apprend , qu'il faut 
consacrer vne partie de nos 
moyens à Dieu , dedier & 
employer à son seruice, & 
pour l'vsage du Temple, 
quelque portion des biens 
qu'il nous donne, & par ce 
moyen luy tesmoigner nostre 
recognoissance.Et dautant 
plus le deuõs nous,que 
les graces spirituelles qu'il 
nous cõmunique sont beaucoup 
plus abondantes , que 
[celles] 
 
celles qu'il departoit au 
peuple d'Israel sous la Loy. 
Que si neantmoins vous 
considerez combiẽ de choses 
il faloit qu'ils contribuassent 
pour le culte diuin, 
vous trouuerez qu'elles 
montoyent à fort haut prix. 
Que sera ce donc , si nous 
sommes eschars de nos 
moyens enuers Dieu , nous 
qui sõmes soulagez, exemptez 
de tant de despenses , 
dons, oblations, sacrifices , 
qu'il faloit faire sous la 
Loy ceremonielle? Et si nonobstant 
ces contributions,  
ces diuerses offrandes Dieu 
multiplioit si fort les facultez 
des Israelites , & les rendoit 
 
si opulents , mesmes 
que plus ils donnoyent liberalement, 
plus ils estoyẽt 
enrichis: croirons nous que 
nous soyons appauuris pour 
auoir cõsacré quelque chose 
de nostre au seruice de 
Dieu,& au soulagement des 
pauures ? Et combien peu 
sera-ce de luy dedier, pour 
le sacré Ministere, la valeur 
de ce qui nous reuient, en 
trois ou quatre iours de 
l'année , de nos biens , de 
nostre industrie & trauail? 
Et qu'elle honte à nous , si 
tenans de sa main liberale 
tout ce que nous possedons 
& acquerons, nous luy en 
refusons , par ingratitude 
[vne] 
 
vne petite partie? Et si nous 
donnant les premices de 
son Esprit,nous luy denions 
celles de nos facultez ? Que 
s'il menaçoit les Israelites 
de les priuer de ses benedictions , 
s'ils ne luy consacroyent 
ce qu'il exigeoit 
d'eux , & s'ils le fraudoyent 
de ce qu'ils luy deuoyent, 
menaces qu'il a finalement 
accomplies par ses horribles 
iugements , ne meriterõs 
nous pas qu'il desploye 
sur nous ses vengeances, si 
nous ne luy rendons en cest 
endroit les effects de nostre 
recognoissance, & si nous le 
frustrõs de ce qu'il requiert 
de nous si iustement ? Qu'il 
 
nous priue de ses benefices 
& temporels , & spirituels, 
qu'il retire de nous ses graces, 
& nous reprouue entierement? 
Et si Dieu n'agreoit 
pas la brebis mince , ni la 
galeuse, ni l'offrande faite à 
contrecœur , penseras tu 
qu'il accepte ce que tu luy 
offriras du pire que tu auras, 
de ce qui sera plus vil , & le 
proffit que tu pourrois reçeuoir 
des plus maigres 
iours de l'année , ou ce que 
tu bailleras forcément , ou 
à regret ; Et ne voit on pas 
des maisons ,qui ne voulans 
contribuer pour le seruice 
de Dieu , qu'escharsement 
& auec plainte, ou par contrainte, 
[trainte] 
 
& apres  sçais-tu, 
lais , & ne daignans chez de 
sacrer quelque peu  par 
moyens , & par vne partie 
sanctifier le tout, se rendent 
indignes de ses benedictiõs, 
attirent sur elles son courroux 
& sa malediction , qui 
s'y fait recognoistre , & sur 
les biens, & sur les corps , & 
sur les ames? Ces exemples, 
& ces raisons nous doiuent 
inciter à nos deuoirs enuers 
Dieu,& si son Esprit est 
en nous , il nous y poussera, 
pour luy tesmoigner les ressentiments 
que nous auons 
de ses faueurs , & pour luy 
offrir auec nos personnes, 
nos biens,qui sont tiens. 
   
nous deuons luy 
les premices de 
 , ne dirons nous 
pas le mesme de celles de 
nostre vie , du temps de 
nostre ieunesse ? en sorte 
qu'elle ne soit point souïllée 
par les vices , deprauée par 
la licence, corrõpuë par les 
desbauches, mais sãctifiée: 
par innocence , modestie, 
humilité , par toutes bonnes 
inclinations , & vertus 
loüables. Car les mauuaises 
mœurs de la ieunesse infectent 
ordinairement toute 
la vie , passent en habitudes 
ou longues,ou perpetuelles, 
& qu'il est ou tres-difficile 
de corriger , ou impossible 
[d'arracher] 
  
d'arracher. Et que sçais-tu, 
si Dieu, pour les pechez de 
ta ieunesse , tu liurera par 
son iuste iugement , & tes 
passions : & si apres que tu 
auras donné tes premiers 
iours à la volupté , à la sensualité , 
il t'abandonnera par 
apres , & ne te fera point 
grace en tes derniers iours? 
  
Dauantage, les premices 
que Dieu demandoit , ne 
nous sont elles pas vn enseignement 
des premices du 
iour que nous luy deuons 
dedier , par prieres, par 
actions de graces, par recognoissance 
de ses benefices, 
par saintes pensées & meditations: 
afin qu'ayans bien 
 
commencé la iournée,nous 
la paracheuions de mesme, 
que nous la passions en sa 
crainte , & en sa grace , & 
attirons sur nous ses benedictions. 
  
Apprenons aussi , par ce 
terme de premices de l'Esprit , 
que comme les premices 
estoyent fort peu en 
comparaison du total des 
fruicts qu'on auoit à cueillir, 
que nous sommes dans vne 
condition defectueuse , & 
bien esloignée de la perfection : 
afin que nous ne 
presumions point de l'auoir 
atteinte,mais que nous soyons 
desireux d'y paruenir, 
& de l'obtenir au Royaume 
[des] 
 
des cieux. Car les premices 
de cest esprit nous estans 
données en petite mesure 
( bien qu'aux vns plus 
qu'aux autres ) ne nous exemptẽt 
pas des infirmités, 
ni du peché : lequel est voirement 
affoibli en nous, 
mais non pas aboli,mortifié, 
mais non pas mort : tant est 
grande nostre corruption 
naturelle , laquelle nous ne 
pouuons entierement despouïller 
qu'auec ce corps 
de mort. 
  
Or l'Apostre disant , que 
 nous auons les premices de 
l'Esprit , n'entend pas que 
nous soyons seulement participans 
de ses dons , mais 
 aussi de sa personne , estant 
le propre des fideles de l'auoir 
habitant en eux , comme 
en vn temple 
1. Corinth. 
3. & 6. Et les temples n'appartiennent 
pas à des 
simples qualités & dons, 
mais à vne personne diuine, 
telle qu'est celle du S.Esprit, 
à laquelle nos corps sont 
consacrés,comme à celle du 
Pere & du Fils. Et certes de 
mesme que nous auons cõmunion 
à Iesus Christ,& par 
luy à ses benefices : ainsi en 
est-il du S.Esprit. Et comme 
les peres communiquent 
à leurs enfans le corps , par 
la generation charnelle: 
Dieu communique son Esprit 
[prit]   à ceux qu'il fait ses enfans 
par la generation spirituelle. 
C'est l'Esprit d'adoption, 
qui nous fait crier 
Abba,
Pere,& qui tesmoigne 
ensemble auec nostre esprit, 
que nous sommes enfans de 
Dieu. 
Rom. 8.  Combien donc est merueilleuse 
la faueur que Dieu 
nous fait , nous donnant 
non seulement les graces 
de son esprit,mais son esprit 
mesme,qui est d'vne mesme 
essence & nature que le Pere, 
& le Fils,eternelle & ineffable? 
Et qu y a il de plus excellent , 
ou de plus digne 
que cest Esprit tout parfaict, 
& autheur de toute saincteté, 
  
de toute vertu,& toute 
bonne operation?Quel plus 
grand tesmoignage de l'amour 
de Dieu, que quand il 
nous donne, auec le Fils de 
son amour,son S. Esprit , qui 
est l'amour & du Pere & du 
Fils? voulant que son Esprit 
nous tienne fidelle & perpetuelle 
compagnie , que 
nous ayons communion & 
vnion inseparable auec luy, 
luy auec nous,& en suite de 
ceste communion & vnion, 
la participation à ses graces, 
les premices de ses thresors 
indicibles. 
 
Si nous desirons auoir 
l'Esprit, le sens, le iugement 
de ceux qui excellent en 
[cognois-] 
 
cognoissance, addresse , & 
prudence pour les choses 
du monde & de ceste 
vie ; combien plus deuons 
nous souhaitter d'auoir l'Esprit 
de Dieu ,qui nous donne 
l'intelligence & la sagesse 
pour les choses du ciel 
& de la vie eternelle ? Et si 
vous estimez vn homme, 
qui a vn rare esprit ,par lequel 
il cognoit & fait plusieurs 
choses admirables, & 
se rend fameux & illustre, 
acquiert des moyens , des 
richesses , des honneurs , & 
la faueur des Grands;combien 
plus est à priser celuy 
qui a l'Esprit de Dieu habitant 
en soy , l'Esprit de sapience 
 
& de saincteté , l'esprit 
de conseil & de force, 
qui surpasse infiniment tous 
les esprits des hommes, qui 
transforme l'homme & le 
change de creature charnelle 
en spirituelle , qui luy 
donne de la cõformité auec 
les Anges, qui le fait conuerser 
familierement auec 
Dieu , duquel il l'asseure 
qu'il est adopté,qui le rẽd 
son imitateur , orné de vertus 
celestes & diuines,victorieux 
sur soy mesme , sur le 
monde, sur Satan , & sur les 
enfers , qui l'enrichit de 
thresors spirituels, & qui finalement 
l'esleue à la beatitude 
permanente & glorieuse : 
& sans lequel Esprit 
 
l'homme demeure dans l'ignorance 
& priuation de sõ 
salut, en sa corruption naturelle, 
en perdition eternelle, 
& du l'ame & du corps. 
  
Si Dieu vous donnoit vn 
de ses Anges plus excellẽts, 
pour vous accompagner & 
assister continuellement & 
visiblement au cours de ceste vie , 
comme l'histoire de 
 Tobie dit qu'vn Ange luy 
fut enuoyé de Dieu , pour 
sõ voyage,ne vous seroit-ce 
pas vn benefice & honneur 
bien grand?Mais Dieu vous 
en confere vn beaucoup 
plus esmerueillable , vous 
donnant son S. Esprit,qui est 
infiniment plus que tous les 
 
Anges,& que toutes les Archanges 
ensemble, qui sont 
esprits administrateurs, auquel 
ils obeïssent ? Et cest 
Esprit est non seulement auec 
vous , mais dans vous, 
pour vous illuminer , adresser , 
sanctifier , fortifier, 
consoler , pour vous esloigner 
du mal , vous encliner 
au bien,pour vous conduire 
& conseruer au cours de ceste 
peregrination terrienne, 
pour vous introduire en la 
partie celeste , & pour vous 
amener au comble de felicité. 
  
& si plein de prudence 
pour les choses 
du monde , que ses conseils 
estoyent comme 
des oracles. Mais ayant 
veu que celuy qu'il auoit 
donné contre Dauid estoit 
dissipé , il s'en alla de 
sa ville,& apres auoir disposé 
de sa maison , s'estrangla 
malheureusement. Ainsi 
plusieurs ont vn esprit fort 
adroit pour les choses de la 
terre , mais incapable de 
celles du ciel. Ainsi plusieurs 
par leur esprit se rendent 
ingenieux à se procurer 
des maux & des malheurs 
extremes,& se perdẽt 
nonobstant leur bel esprit 
 
& par leur esprit propre. 
Mais l'Esprit de Dieu nous 
rend heureux , si nous nous 
soubmettons à sa cõduite, il 
nous cõseille, il nous cõsole, 
nous addresse au bien, nous 
preserue de mal, & si nous y 
tombons par nostre propre 
faute,il nous en retire. Il soulage 
nos foiblesses,tempere 
nos tristesses , appaise nos 
douleurs , allege nos trauaux, 
addoucit nos miseres, 
& fait que nous nous glorifions 
mesmes en nos tribulations , 
il nous garantit de 
la mort eternelle , & nous 
rend possesseurs de l'immortalité 
glorieuse. 
  
Dieu donne par fois des 
[impulsions] 
 
impulsions par son Esprit 
aux hommes , afin de faire 
par leur moyen des œuures 
grandes , excellentes & 
merueilleuses. Tels sont les 
mouuements heroïques en 
ceux par lesquels Dieu veut 
fonder les Empires, conseruer 
les Estats , restaurer les 
Monarchies, cõquester des 
païs , accroistre les Royaumes 
ou les Republiques, 
vaincre les ennemis , surmonter 
les armées. Les effects 
de cest Esprit se sont 
veus en la personne de plusieurs 
que l'histoire saincte 
& profane mentionne , en 
des grands Capitaines,Empereurs, 
Monarques, Legislateurs, 
 
politiques, & hommes 
ornez de qualitez sureminentes. 
Mais les Fideles 
qui sont doüez de l'Esprit 
de Dieu,reçoyuent bien vn 
plus grand aduãtage. Car il 
reside en eux , & pour tousiours , 
& comme il a plusieurs 
& diuerses operatiõs, 
aussi agit il en eux par 
des effects bien plus nobles, 
& plus importants, que tout 
ce qui peut concerner ceste 
vie , & ce monde. Car c'est 
pour la plus grande gloire 
de Dieu,pour l'aduancemẽt 
de son regne , pour la destruction 
de celuy de Satan, 
pour des victoires spirituelles, 
pour les vertus Chrestiennes , 
[stiennes] 
 
pour le salut & 
pour la glorification bienheureuse. 
Et dequoy seruira 
il à vn homme de vaincre 
les autres , s'il est surmonté 
par la chair?de dompter les 
peuples , s'il est captiué 
par Satan ? d'acquerir des 
Empires s'il est assuietti à la 
tyrannie des enfers?de gouuerner 
vn Estat , s'il est 
gourmandé par ses passions? 
de gagner tout le monde, 
s'il fait perte de son ame? 
  
Dieu , par son Esprit a 
donné des mouuements 
extraordinaires, & surnaturels 
à quelques vns d'entre 
les hommes , pour des operations 
miraculeuses, cõme 
 
aux Apostres,& à quelques 
autres desquels il s'est 
serui pour estre les instruments 
de ses merueilles. 
Mais ; les premices de l'Esprit, 
dont parle S. Paul , ces 
dons qui sont propres aux 
enfans de Dieu , bien qu'ils 
n'ayent pas tel esclat , & 
n'excitent pas l'admiration 
du monde , sont bien plus 
excellents & plus à priser, 
puis qu'ils nous sont conferez 
pour le salut,qu'ils nous 
y disposẽt,nous en asseurẽt, 
& nous en rendent possesseurs : 
qu'ils forment en 
nous la sanctification , & 
nous sont des gages de nostre 
beatitude glorieuse. Et 
[certes] 
 
certes , que proffitent il à 
quelqu'vn d'auoir la foy 
miraculeuse , s'il n'a la foy 
iustifiante ? de transporter 
les montagnes , s'il n'a le 
mouuement pour les choses 
spirituelles ? de commander 
aux elements , s'il 
demeure en la seruitude du 
peché ? de ressusciter les 
morts , s'il est mort en ses 
offenses ? de chasser les demons 
hors des corps des 
autres , si son ame est maistrisée 
par le diable au moyen 
de ses vices ?& de dire au 
dernier iour,Seigneur , Seigneur, 
n'auons nous pas ietté 
hors les diables en ton 
nom , & n'auons nous pas 
 
fait plusieurs vertus en ton 
nom ? s'il est respondu à luy 
& à ses sẽblables, ie ne vous 
cognu onques , departez 
vous de moy , ouuriers d'iniquité. 
  
O combien est excellẽte 
ceste prerogatiue,combien 
douce ceste consolation d'auoir 
les premices de l'Esprit 
de Dieu , ses dons precieux 
pour le salut , ses graces 
spirituelles, pour la vie 
eternelle, & qui nous en sõt 
les arrhes , les gages , les 
commencements , & les auantgouts! 
O combien sont 
à priser , à cherir ces benefices 
& thresors celestes , la 
lumiere de l'entendement, 
[la] 
 
la droicture de la volonté, 
la sanctification de nos personnes , 
la paix de nos consciences , 
les vertus Chrestiennes , 
& les biens & le 
bonheur qui ses suiuent! La 
foy en la parole de Dieu, 
l'esperance en sa grace , la 
patience és souffrances , le 
conseil és perplexitez , la 
consolation és aduersitez,la 
resolution és dangers , la 
victoire és tentations. Le 
sentiment intime de l'amour 
& faueur de Dieu , la 
confiance en sa continuelle 
& paternelle protection, 
l'asseurance de son secours 
à nostre besoin , de son assistance 
en nos necessitez, 
 
de sa conduite en tout le 
cours de nostre vie , la perpersuasion 
de nostre adoption, 
de nostre iustification, 
de nostre redemption , de 
nostre glorification eternelle! 
  
O que les premices de 
cest Esprit nous sont vn 
grand suiet d'accouragement 
& de constance en 
nostre vocation spirituelle, 
& parmi nos trauaux & 
souspirs! Car si les autres 
creatures , qui n'ont point 
de part à ce priuilege , persistent 
neantmoins en leurs 
fonctions , & patientent en 
leurs peines , souspirans apres 
le temps de l'vniuerselle 
[selle] 
 restauration , qui nous 
est promise; ne deuons nous 
pas perseuerer inuariablement 
en nos deuoirs, estans 
assistez de cest Esprit celeste , 
diuin & tout puissant, 
qui vient au secours de nos 
foiblesses , pour consoler 
nos ennuis, fortifier nos 
cœurs, affermir nostre courage , 
rauiuer nostre foy, 
renflammer nostre esperance, 
nous munir de toutes 
vertus , & nous donner l'asseurance 
de nostre parfaicte 
felicité : selon qu'il est appellé 
par l'Apostre le seau 
de la promesse,& l'arrhe de 
nostre heritage. 
Ephes.I.    
Ne serons-nous pas donc 
 
perseuerans en la patience 
de nos maux , & en l'esperance 
de nos biens , estans 
munis de cest Esprit & de 
ses premices,propres à ceux 
auquel appartient la beatitude 
eternelle? Par la force 
de cest Esprit nous surmontons 
les efforts des ennemis 
de nostre salut, par sa vertu, 
nos infirmitez, par ses consolations 
nos afflictions,par 
ses persuasions nos doutes, 
par sa certitude nos perplexitez. 
Et quelle force plus 
puissante , quelle vertu plus 
diuine , quelle consolation 
plus efficacieuse,quelle persuasion , 
plus authentique, 
quelle certitude plus asseurée 
[rée] 
 
pouuons nous desirer 
que celle du Sainct Esprit? 
Cest Esprit n'est point suiet 
à ignorance,à erreur,ou deception , 
comme celuy des 
hommes , mais est tres-parfait 
en cognoissance,en verité, 
en infaillibilité. L'assistance 
donc, & l'asseurance 
qu'il nous donne , nous 
maintiennẽt en ferme perseuerance: 
& ses consolatiõs 
surabondantes à toutes nos 
afflictions , font que c'est auec 
paisible patience , que 
  nous souspirons en nous mesmes . 
  
Sainct Paul comprend 
en ces paroles tous Fidelles 
en general,& specialement 
 
soy mesme & les autres Apostres : 
afin que nous n'estimons 
pas que leurs personnes 
si cheres à Dieu , si 
aduantagées en dons spirituels, 
en toutes graces extraordinaires , 
ayent eu 
moins que nous d'occasion 
de souspirer.Et afin que par 
de si notables exemples de 
patience , & par la conformité 
de nostre condition à 
la leur,nous soyons capables 
de plus de consolation & 
de constance , estans leurs 
compagnons en la souffrance 
de leurs afflictions, 
& en l'esperance de leur 
gloire. Que s'il y a de la 
disparité entr'eux & nous, 
[en] 
 
en quoy se trouuera-elle, sinon 
en ce qu'autant qu'ils 
ont excellé par dessus nous 
en vertus, autãt nous ont ils 
surpassés en souffrances , & 
par cõsequẽt, ayãs peu auec 
plus de suiet que nous, prononcer 
ces paroles,  Nous qui 
auons les premices de l'Esprit, 
nous mesmes souspirons en nous 
mesmes, en attẽdant l'adoptiõ, 
la redemption de nostre corps. 
  
La prouidence de Dieu, 
admirable en toutes sortes, 
pour le salut de ses enfans, a 
voulu, des le cõmencement 
de la predication de l'Euangile , 
pouruoir à leur 
pleine instruction, non seulement 
par preceptes, mais 
aussi par exemples.Et d'autant 
 qu'ils sont exercez par 
diuerses afflictions , qu'ils 
ont à porter chasque iour 
leur croix, que c'est par 
plusieurs oppressions qu'il 
nous faut entrer au Royaume 
des cieux , il nous a 
donné ses Apostres , pour 
patron de patience , les 
rendant signalés en toutes 
sortes d'espreuues,& les faisant 
passer par tant d'aduersitez , 
que leur vie n'en 
a esté qu'vne suite 
contitinuelle. 
Dequoy nous auons 
vn tesmoignage au 
liure de leurs actes,& au denombrement 
que S. Paul 
nous fait des siennes,
2.Corinth. 
II.Et qu'est-ce que les 
[Chrestiens]   
Chrestiens n'ont pas souffert 
durant les trois premiers 
siecles? quelles persecutions , 
quels tourments, 
quelles sortes de supplices 
estrãgers & horribles n'ont 
ils pas enduré? Si dõc les Apostres, 
& les plus saincts qui 
furent sur la terre, ont senti 
tant d'afflictions , en voudrions 
nous estre exempts? 
aurions nous à cõtre cœur 
d'estre conformes à leur 
condition , comme ils l'ont 
esté à celle du Fils de Dieu? 
Si nous refusõs d'estre leurs 
compagnons és combats, 
le pouuons nous estre en 
leur triomphe? si nous desdaignons 
la croix de Christ, 
 
oserons-nous pretendre à 
à sa gloire? Et le mesme Esprit 
qui a soustenu les Apostres, 
les Fideles,les Martyrs , 
au milieu de leurs tribulations , 
des persecutions 
& morts les plus cruelles, 
dans les feux & dans les 
flammes : ce mesme Esprit 
qui nous est donné , ne 
nous fortifiera-il pas , pour 
nous rendre victorieux és 
angoisses les plus extremes, 
és extremitez les plus angoisseuses, 
contre toutes aduersitez , 
& contre tous aduersaires? 
  
deffit vn lion; & si cest Esprit 
est en nous , & non par 
passades,ou saillies,mais par 
vne residence perpetuelle, 
ne vaincrons nous pas le lion 
infernal , qui est Satan , & 
tous les ennemis de nostre 
salut? Et qu'y aura il d'impossible 
à cest Esprit,par la vertu 
duquel Dieu a creé le 
monde, le conserue, & fait 
toutes ses œuures? Par cest 
Esprit donc ne serons-nous 
pas affermis en courage, en 
resolutiõ, en constance cõtre 
toutes trauerses & calamités? 
Et serions nous si lasches 
de nous laisser intimider estonner , 
par l'apprehensiõ 
des afflictions, & des 
 
souffrances, ou de ceder, de 
succomber à leur effort, lors 
que Dieu voudra nous y 
exercer, pour tirer des preuues 
de nostre foy, patience, 
obeïssance , & pour manifester 
en nous la grace , le 
secours,& la force de sõ Esprit? 
car ne seroit-ce pas & 
se deffier de sa vertu, à mõstrer 
qu'elle n'habite point 
en nous,& que si nous en auons 
la cognoissance, nous 
n'ẽ auons pas le sentiment? 
Et à qui appartient il mieux 
d'estre courageux,ferme,inuincible, 
inesbrãlable qu'au 
Fidelle ; qui a l'assistance & 
vertu diuine auec soy & dãs 
soy,par les premices de l'Esprit, 
les consolations ineffables, 
 
& les asseurances de sa 
glorification eternelle. 
  
Or cest Esprit estant en 
nous , qu'elle doit estre nostre 
vie,sinõ saĩcte & celeste, 
& par maniere de dire,diuine, 
cõme cest Esprit est faict, 
celeste,& diuin?Selon qu'est 
l'Esprit des creatures , aussi 
sont elles mesmes; plus leur 
esprit est excellẽt, plus elles 
sont excellentes , agissans 
selon la vertu & les proprietez 
de leur Esprit. Ainsi les 
bestes excellent par dessus 
les plantes,les hommes par 
dessus les bestes , & entre 
les hommes les vns par 
dessus les autres, & de mesme 
en est-il de leurs operations , 
procedantes de 
 l'Esprit qui les anime.Quelles 
donc doiuent estre nos 
personnes,nos vertus,& nos 
œuures,estans doüez de cest 
Esprit si saint & si parfaict? 
Samuel disoit à Saul. 
Tu 
viendras au costau de 
Dieu,& tu rencontreras vne 
compagnie de Prophetes:adonc 
l'Esprit de l'Eternel 
te saisira , & tu propherizeras 
auec eux,& seras chãgé 
en vn autre homme , 
I. 
Samuel 10. Et nous qui som- 
mes venus au mõt de Dieu, 
qui est l'Eglise, & la saincte 
congregation où nous oyons 
les Prophetes & les 
Apostres parlans à nous, & 
où le S. Esprit nous est donné, 
[né,]   
né,ne deuons nous pas cõme 
prophetizans,parler les 
choses magnifiques de 
Dieu, estre changez en autres 
hommes, estre nouuelles 
creatures , & auoir vne 
conuersation comme de 
bourgeois des cieux? Si Elizée, 
apres que le Prophete 
Elie eust ietté sõ mãteau sur 
luy , quitta son labourage, 
son mesnage, & sa forme de 
viure precedente, pour suiure 
& seruir Elie ; nous qui 
sommes reuestus de l'Esprit 
de Dieu, ne laisserons nous 
pas le train du monde , ne 
renoncerons nous pas aux 
affections charnelles , pour 
obeir à nostre vocation celeste , 
 
pour adherer à Dieu, 
luy dedier nos personnes, 
luy consacrer nos seruices? 
Et que sera-ce si nous sommes 
refractaires à cest Esprit , 
si nous resistons à ses 
mouuements , si nous repoussons 
ses impulsions, si 
nous estouffons ses inspirations ? 
Et que dirons-nous 
de tant de gents de parmi 
nous,qui voulans estre creus 
auoir les premices de cest 
Esprit, tesmoignẽt par leurs 
deportements estre possedez 
d'vn esprit du tout contraire? 
qui preferans leur esprit charnel , 
& mondain à 
cest Esprit de Dieu,le combattẽt, 
luy font la guerre, & 
[ausquels] 
 ausquels on peut dire ce que 
S. Estienne reprochoit aux 
Iuifs, 
Actes 7. vous vous ahurtez 
tousiours contre le 
S. Esprit. 
   Apprenez à vous y submettre ; 
à l'appeller par vos 
vœux, à le demãder à Dieu, 
qui le vous ottroyera,selon 
la promesse de son Fils ? Car 
si vous , qui estes mauuais 
sçauez donner à vos enfans 
choses bonnes : 
combien 
plus vostre Pere celeste 
donnera-il son Esprit à 
ceux qui le luy demandent?  
Luc.II.13 . Apprenez à priser 
ses dons , à rechercher ses 
graces , à cherir ses benefices , 
à gouster ses delices, à 
  
sauourer ses douceurs ineffables. 
Priez le Seigneur 
qu'il ne vous abãdõne point 
à vostre propre sens , qu'il 
ne vous liure point à vos affectiõs 
sensuelles: mais qu'il 
sanctifie vostre esprit par le 
sien,le guide,l'assiste,le gouuerne, 
le fortifie. Que vous 
ayant donné son Esprit , il 
ne le retire point de vous, 
& ne permette point qu'il 
s'y esteigne: mais qu'il vous 
en continuë, perpetue , & 
augmente les premices , les 
vertus , & les operations, 
pour soustenir constammẽt, 
infatigablement toutes aduersitez , 
toutes calamitez, 
pour vaincre toutes tentations, 
[tions] 
 
toutes mauuaises suggestions , 
& pour viure religieusement, 
& sainctemẽt, 
en l'esperance , en l'asseurance 
de la vie eternelle. 
  
Et souuenons-nous , que 
c'est ici le temps & le lieu 
de nos souspirs , & non de 
l'accomplissement de nos 
desirs: de nos gemissemẽts, 
non de nos contentements, 
de nostre misere , non de 
nostre beatitude ; que nous 
y auons nos maux en effect, 
& nostre bon-heur en esperance. 
Et si toutes creatures 
souspirent, & si leurs souspirs 
tendent à ceste fin, que 
les enfans de Dieu soyent 
pleinement glorifiez, (dautant 
 
qu'estans faits pour 
l'homme , elles luy sont cõme 
coniointes , par vne 
merueilleuse sympatie, tesmoignans 
du ressentiment 
de ses maux, ausquels elles 
compatissent. Et dautant 
qu'elles ne peuuent obtenir 
leur restauration , qu'au 
temps de celle des eleus:) 
Nous, qui sommes logez au 
milieu de toutes creatures, 
qui deuõs auoir continuellement 
nos oreilles remplies 
de leurs souspirs , qui 
sçauons quelles souspirent 
pour l'amour de nous , ne 
serons-nous pas touchez en 
nos cœurs de leurs souspirs , 
& des causes qui les 
[pro] 
 
produisent? Les creatures 
irraisonnables , insensibles, 
inanimées, auront elles de 
la passion, de la compassion 
pour nous, & n'en aurions 
nous point pour nous mesmes ? 
Auront elles de la 
compassion de nostre misere , 
de la passion pour nostre 
beatitude;& nous point 
de sentiment pour celle là, 
ni d'affection pour celle ci? 
Les creatures destituées de 
raison semblent la vestir 
pour l'homme, & l'homme 
qui en est doüé , s'en despouïllera 
il, pour ne point 
souspirer ses maux , & pour 
ne point aspirer à sa felicité? 
L'homme qui est le Maistre 
 
des creatures,seul entr'elles 
orné d'intelligence : sera il 
inferieur à elles , incapable 
d'estre leur disciple, de suiure 
la leçon qu'elles luy 
monstrent, de tenir sa partie 
en ceste triste & vniuerselle 
harmonie de complaintes , 
de doleances, de 
souspirs,& gemissements de 
toutes creatures de cest vniuers, 
desplorans leur misere 
& la sienne, & souhaittãs 
leur restauration,& sa beatitude? 
L'homme sera il plus 
brute enuers soy mesme,  
que les creatures brutes enuers 
luy? Car elles surmontent 
leur nature brute,souspirans 
pour nous & pour 
[elles] 
 
elles.Et nous, ne souspirans 
ni pour elles , ni pour nous, 
ne tesmoignerons-nous pas 
vn naturel plus que brute , 
& plus stupide enuers 
nous mesmes , que celuy 
des creatures brutes enuers 
nous ? Serions nous seuls à 
ne souspirer point , nous 
pour qui toutes creatures 
souspirent , & qui seuls en 
auons plus de suiet,que toutes 
elles ensemble ? Souspirons 
donc , & que nos 
souspirs surmontent ceux 
de toutes les creatures , cõme 
nos miseres surpassent 
les leurs , & nostre future 
restauration celle qu'elles 
attendent. Mais , que nos 
 
souspirs soyent formez par 
le S. Esprit , & rendus par 
son efficace si ardans, si 
vehements , qu'ils tesmoignent 
vne affection ineffable, 
& que montans iusques 
à Dieu,ils penetrent & remplissent 
son oreille. 
  
Consolons nous aussi par 
les premices de cest Esprit, 
qui nous sont données en 
tesmoignage,en seau,en asseurance 
de l'accomplissement 
de ses dons,de la plenitude 
de ses graces , & du 
comble de nostre bõ-heur. 
Et si les creatures destituées 
des premices de cest Esprit, 
persistent neantmoins sans 
defaillance , sans interruption, 
[tion,] 
 
sans relasche, en leurs 
offices, vigueur, trauaux, operations : 
& comme s'encourageãs 
entr'elles,& pour 
l'amour de nous , & pour 
l'attente de la derniere restauration ; 
quelle force, 
quel courage , quelle constance, 
& perseuerance ne 
deuons nous monstrer , estans 
animez, armez, fortifiez 
par cest esprit habitant 
en nous, qui est la vertu, & 
la puissance de Dieu ? Ces 
premices de l'Esprit nous 
estans des arrhes de nostre 
salut , & bon-heur eternel, 
douterons nous de la certitude 
de son accomplissement? 
Croirons nous aux 
 
promesses des hommes, nõ 
à elles du Dieu viuant? Les 
premices que la terre nous 
presente , nous feront elles 
foy de l'entiere moisson : & 
les premices que nous auõs 
de l'Esprit de Dieu,ne nous 
rẽdront elles pas persuadés 
de la pleine reception de ses 
dons , de laquelle ces premices 
nous sont les gages 
asseurez & indubitables? 
Aurons nous plus de creãce 
à la terre,qu'à Dieu mesme? 
Au tesmoignage de nos sẽs, 
qu'à celuy du S. Esprit? 
  
Si donc nous auons desia 
les commencements, ils seront 
suyuis de leur accomplissement; 
les premices de 
[l'abon] 
 
l'abondance , la partie du 
total. Et si l'Esprit de Dieu, 
(auteur des premices de la 
grace , & des arrhes de la 
gloire) est resident en nous, 
quel instructeur plus veritable, 
quel consolateur plus 
doux , quel conseiller plus 
sage,quel conseruateur plus 
puissant pouuons nous souhaitter? 
Quelle ignorance 
ne surmonterons-nous par 
son instruction? quelles tristesses 
par ses consolatiõs? 
quelles perplexités par ses 
conseils?quels dãgers par sa 
conseruation ? Et si Iesus 
Christ a pris nostre chair,& 
nous a donné son esprit, 
vnissant nostre chair à soy 
 
& son Esprit à nous : quelle 
asseurãce plus grande voulons 
nous de nostre beatitude , 
puis que nous auons 
desia nostre chair au ciel,en 
la personne de Iesus Christ, 
& l'Esprit de Christ en nostre 
personne,& resident en 
nostre chair , nostre corps 
estans le Temple & le sanctuaire 
de son Esprit;Quels 
gages plus certains, que celuy 
de nostre chair habitãte 
& regnante és cieux , en Iesus 
Christ nostre Chef,& de 
l'Esprit de Christ habitant 
& regnant en nos cœurs? 
Ayãs cest Esprit auec nous, 
& dans nous , pour hoste, 
pour hostage,combien precieuse 
[cieuse] 
 
nous doit estre sa demeure 
en nous ? Combien 
soigneusement le deuons 
nous retenir,entretenir , sãs 
le desdaigner par nos pechez, 
sans le chasser par nos 
vices? Car cest Esprit de pureté 
se plairoit il auec vne 
ame impure? Cest esprit de 
sanctification agreeroit-il 
de loger en vn esprit assuietti 
à la souïllure , plongé 
dans l'ordure?Ne contristez 
point donc le S. Esprit de 
Dieu , par lequel vous auez 
esté seellez pour le iour de 
la redemption. 
  
Et si les premices ne deuoyent 
estre employées à 
des vsages profanes , ni demeurer 
 
inutiles , mais estoyent 
demandées de Dieu 
pour son seruice:voudrions 
nous profaner les sacrées 
premices du S. Esprit,ou les 
laisser perir par nostre nonchalance, 
sans les employer 
religieusement à l'honneur 
de celuy de qui nous les auons 
receuës : comme si 
nous n'auions nul regret de 
les perdre, ni d'estre priuez 
de la felicité glorieuse 
qu'elles nous promettent? 
voudrions-nous enfouïr ce 
talent celeste, sans le faire 
valoir à la gloire de Dieu, à 
la consolation & au salut de 
nos ames , & à l'edification 
de l'Eglise, pour estre iettez 
[aux] 
 
aux tenebres de dehors, où 
il y a pleur & grincement 
de dents? 
  
Dieu promettoit accroissement 
de benedictions, 
lors que les premices luy 
estoyent deuëmẽt offertes, 
selon la Loi:soyons asseurez 
aussi , que si nous employõs 
sainctement les premices 
que nous auons de l'Esprit, 
Dieu nous en augmentera 
les dons en ceste vie , selon 
ses richesses ineffables , & 
ses thresors inespuisables, 
accõplissant en nous ce que 
le Sauueur disoit , A celuy 
qui a,il luy sera donné , & il 
en aura tant & plus,& finalement, 
qu'il nous remplira 
 
des benefices,de sa grace,& 
de sa gloire , dans les cieux. 
  
Et puis que Dieu nous 
donne les premices celestes 
de son esprit, luy refuserons 
nous les premices terriẽnes 
de nostre auoir,veu mesmes 
qu'elles sont des biens qu'il 
nous eslargit:que plus nous 
serons liberaux enuers luy , 
plus le sera-il enuers nous: 
que les choses qu'il nous 
donne sont infiniment plus 
que celles que nous luy dõnons, 
& qu'en luy donnant, 
nous acquerons,& nous enrichissons ? 
Les premices 
estoyent des meilleurs & 
des plus beaux fruicts , que 
de mesmes nous offrirons à 
[Dieu] 
 Dieu du meilleur & du plus 
beau de ce que nous auons, 
auec vne franche volonté, 
prattiquans le commandement 
du sage , 
Honore l'Eternel 
de ton auoir , & des 
premices de tout ton retenu.  
Prouerb.3.9.    
Donnons luy semblablement 
les premices de chaque 
iour , par vne saincte 
deuotion, par vne ardante 
esleuation de nos cœurs à 
luy, par des intimes actions 
de graces à sa bonté, des faueurs 
continuelles que sa 
misericorde espand sur 
nous , & qu'il nous renouuelle 
tous les iours. 
  
Et vous , ieunes gens, 
 
donnez à Dieu les premices 
de vos ans & de vostre vie, 
laquelle estant sanctifiée en 
ses commencements,le sera 
dauantage en son progrez 
& en sa fin,& remunerée de 
benedictions & spirituelles 
& temporelles. 
  
Et comme ceux qui auoyent 
cueilli les premiers 
fruicts se resiouïssoyent par 
l'asseurance de la prochaine 
& entiere cueillette ,laquelle 
ils attendoyent auec vn 
grand desir; nous qui auons 
les premices de l'Esprit, cõsolons 
nous par la certitude 
de la pleine abondance,dõt 
nous serons bien tost iouïssans; 
& la souhaittons ardãment 
[ment] 
 
l'attendans auec vne 
affection & passion vehemente, 
aspirans de tout nostre 
cœur au ciel , où elle 
nous est reseruée. 
  
Si lors que les enfans 
d'Israel estoyent au desert, 
& que leur furent apportés, 
pour monstre,des fruicts de 
la terre de Chanaan, beaux 
à merueille , capables de 
donner courage à chascun 
d'eux,pour aller conquester 
& posseder ce riche païs: 
combien plus les premices 
que nous auons du ciel & 
de ses graces excellentes,& 
qui nous en promettent 
de plus grandes infiniment, 
nous doiuent inciter & enflammer 
 
à tendre à l'acquisition 
& possession de la 
Chanaan celeste , où leur 
entiere plenitude nous attend? 
Que si pour y paruenir 
nous rencontrons des 
difficultez , des trauerses, 
des obstacles, par la malice, 
puissance,& nombre de nos 
ennemis & corporels & spirituels, 
par les infirmitez de 
nos personnes , par les diuerses 
souffrances & tribulations 
par lesquelles il nous 
faut entrer au Royaume de 
Dieu; nous voudrions nous 
relascher, intimider,par les 
apprehensions , comme les 
enfans d'Israel au desert? 
Plutost,plutost faut il nous 
[affer-] 
 
affermir en courage, en cõstance, 
en esperance,en toute 
vertu,par la consideratiõ 
des promesses de Dieu,des 
premices de son Esprit , & 
par l'asseurãce de sõ secours. 
Car celuy qui est en nous est 
plus grand que celuy qui est 
au monde, que le Prince de 
ce mõde,que le mõde,& que 
tout ce qui est au monde, & 
qui nous en rendra vainqueurs , 
& plus que vainqueurs. 
Partant, mes freres, 
animez de cest Esprit,armez, 
de ceste vertu, cõbattõs,perseuerõs 
auec toute vigueur, 
& ardeur, & aspirõs auec allegresse 
à l'heritage celeste. 
  
Où nous aurons nos 
 
biens , non en partie , mais 
pleinement , nous & demi, 
mais entierement : non en 
petite mesure,mais en comble: 
non en premices , mais 
en total?non successiuemẽt, 
mais ensemblement;non auec 
defaut, mais parfaitement ? 
non meslangez de 
maux,mais purs;non en degré 
mediocre , mais supreme; 
non pour quelque tẽps, 
mais pour tousiours. 
  
Là , nous serons riches 
sans auarice,possedans tout 
sans inquietude , regnans 
sans sollicitude,heureux sãs 
orgueil,ioyeux sãs insolẽce, 
aimans sans ialousie, agissãs 
sans trauail, nous reposant 
[sans] 
 
sans oisiueté. 
  
Là , nostre vie sera seure 
sans danger , paisible sans 
trouble, pure sans souïllure, 
saincte sans corruption, 
parfaite sans manquement, 
contente sans desplaisir,delectable 
sans ennui,glorieuse 
sans infirmité , asseurée 
sans changement, ferme sãs 
mutation, permanente sans 
fin , par Iesus Christ nostre 
Seigneur. Amen.